20 juillet 2015

HUMANITE



                       Crédit DR
6. 
Six! 
C'est le nombre total de chances qu'il vous reste pour aller voir -ou revoir- Bestias de la Compagnie Baro d'Evel Cirk avant qu'elle ne s'évapore pour des contrées plus lointaines. Ni une, ni deux, vous avez tout juste le temps de finir ces lignes visant à vous convaincre entièrement, puis d'attraper le bus/vélo/poneydiesel pour rejoindre le si bucolique espace chapiteau de La Villette et de pénétrer dans l'antre circulaire et mystérieux de cette compagnie. Et là, la magie opérera durant 89 magnifiques minutes, qui tour à tour -de cirque- vous bouleverseront, émoustilleront, rendront hilares ou coi, ou que sais-je, vous verrez bien et c'est tant mieux.
 La compagnie signe ici son 7ème opus, et c'est un condensé d'émotions en tout genre. Nous naviguons à dos de cheval dans un univers mystique et guerrier, nous volons accompagné de 3 perruches et autres bêtes acrobates et rieuses pour atterrir dans une danse effrénée et hypnotique. Rien ne les arrête et nous non plus, rien de nous retient de venir les enlacer à la fin de la démonstration sous l'un des chaps' attenants. C'est bien ici que réside la force du cirque et de leurs bêtes de foire, plus ou moins humaines, c'est qu'elles s’immiscent dans nos têtes et ne quittent plus nos cœurs tout ragaillardis par tant d'humanité et de bestialité retrouvées. Et l'effet dure au delà des 45 minutes de métro du retour, c'est dire... Conclusion : réveillons la bête qui grommelle en nous et conjuguons-la au plus-que-parfait du Baro d'Evel sans plus tarder.
6! N'oubliez pas, six!


> jusqu'au 25 juillet à La Villette 




16 avril 2015

COUTEAU-SUISSE


                                                                                                                                                                                                      Credit DR

Il était temps de vous parler de l'ami Piero. Piero Fornasetti, donc, à qui Les Arts décoratifs consacrent une exposition agilement sus-nommée La folie pratique. Car il l'est, bel et bien, un peu foutraque et démesuré ce vieux Piero (mort en 1988 à 75 ans). Tout d'abord, Piero est un touche à tout: peintre, sculpteur, graphiste, designer, inventeur, précurseur, décorateur, imprimeur, éditeur, collectionneur, marchand... et italien. Bon début.
Ensuite, son œuvre se traduit en successions de thèmes & variations, sans fin. Une obsession créative, une constance du concept s'exprimant encore et encore...sur tout ce qui passe: objets du quotidien, vaisselles, murs, meubles, papiers peints, tableaux, pierres, vitraux. Un vrai cabinet de curiosités. Mais un cabinet raffiné, très arts déco justement, où le bon goût flirte avec le kitsch, le sourire en coin.
Chapeau bas pour le visage de Lina, chanteuse soprano que Piero a érigé en muse-é vivante, qui se trouve décliné de 1001 façons tout à fait délicates quoi qu'incongrues: Lina sur un vase, Lina sur une assiette à soupe, Lina sur le parapluie, Lina en horloge, Lina en théière, Lina en chaise, Lina en lampe, Lina en table...
Décidemment Piero est un multi-artiste divertissant, non pas majeur pour la création contemporaine mais fort rafraichissant pour son époque. Un vrai couteau...-italien.

> jusqu'au 14 juin aux Arts Déco



16 mars 2015

MEUTE



                                                                                                                                                                                              Crédit DR

Incontrôlables.
Ils sont 24, ou 37, on ne sait plus. Les chiens de navarre surgissent de partout et ne nous laissent aucun répit. On les croirait mille. Ils ne sont que 10. Dix fougues, dix furies, dix folies.
Le propos..? On ne saurait vraiment dire, oui la relation amoureuse, ou plutôt les affects dans nos petites vies du 21eme siècle, sont au centre de la réflexion (et autour aussi...). Les amours gonflés d'égo ou d'hypocrysie côtoient les sentiments naissants ou misérables, la sexualité "à perte" ou l'envie d'être aimé. Mais l'ensemble est emballé dans un grand fracas de scènes débridées, trash et toujours drôles. Si je peux vous donner un conseil, ne loupez pas le meilleur et arrivez tôt dans la salle. Déjà parce qu'elle est magnifique éclairée et surtout parce qu'il faut déguster le prélude de la pièce... N'en révélant pas plus, j'ai réellement trouvé cette compagnie fraiche et folle, dans tous les sens de tous les termes, et j'ai très envie de découvrir leurs précédentes œuvres: Une raclette, Quand je pense qu'on va vieillir ensemble, Regarde le lustre et articule,ou Pousse ton coude dans l'axe, notamment... 
"Les chiens de Navarre ne veulent surtout pas perdre le présent sur un plateau" et ils ont bien raison, c'est petit et fragile le présent. Il faut le dorloter, le cultiver et il deviendra grand, comme eux.


> jusqu'au 22 mars les armoires normandes aux Bouffes du Nord


10 mars 2015

BRISE



                                                                                                                                                                               Crédit DR Cie Rode Boom

Bonjour à toi - aujourd'hui on est fou- on est heureux - on respire l'air si léger et frêle de cette fin d'hiver - l'amorce douce du début dudit printemps - on ne se sait plus trop si mettre le gros pull côtelé ou le petit gilet fleuri- et c'est tant mieux- on est vivant et on fait des projets-si si -voilà on y est.
Et moi, toute hirsute que je suis, je me pointe présentement devant vous pour vous faire état des évènements qui m'évoquent de la "belle matière" en ce moment. Tout d'abord m'excuser de n'avoir pas su saisir le clavier assez tôt pour vous parler de mon ressenti sur Jeff (Koo-Koons), ni sur Marcel (Du-Duch'), tout autant que sur les parties fines du temps des geishas (ces coquinettes). Mais, je vous rassure, vu d'ici, vous n'avez rien perdu -ou presque-. 
Mais là, j'ai du beau, du bon, du bio dans mon panier culturel (oui la culture bio existe: elle est authentique, belle et généreuse) .... J'y vais??? 
On démarre les doigts dans la prise avec le festival Hautes Tensions où il ne faut pas manquer l'Homme Cornu de la Compagnie Rode Boom, qui porte bien son nom puisque ça BOOM dans tes mains (quand tu applaudis) et dans ton cerveau (quand tu t'es sers), & même le cœur n'en ressort pas indemne tant Kurt Demey nous chamboule... N'étant pas friande des jeux de manipulation mentale, je pensais rester totalement en dehors de cette joute psychologique, et finalement j'étais tellement à fond que j'aurais chéri l'idée d'être "l'élue", choisie parmi tous pour être manœuvrée par le grand maître ES épaules de cerf. Je lui aurais crié "ouvres-moi!" comme dans la chanson, mais in fine c'est moi qu'il aurait ouvert, tel un livre (à choisir je veux bien être un petit Gallimard de la rentrée littéraire) et il aurait TOUT su. Haaaan, mon dieu; finalement je préfère avoir assisté tranquillos à son rite de mentalisation depuis ma chaise. Pas courageuse, la Cailloux...  Toi aussi, sois brave et tente l'expérience avec l'homme cornu, et tu ne seras point déçu.
Nonobstant (je revendique la survie du nonobstantisme), si tu préfères sautiller sur ton siège plutôt que de te cacher vainement derrière l'anorak de ton voisin pour ne pas monter sur scène, alors Le show must go on de Jérôme Bel est bien pour toi. Chorégraphe réputé, cette pièce est l'une de ses plus emblématiques pour avoir gommé toute frontière entre danseurs amateurs et professionnels, et avoir mis en scène des tubes de la culture pop. Ça donne quoi? Une scène transformée en joyeuse piste de danse investie par des interprètes de tout poil qui s'éclatent "en live" option DJ, c'est complètement fou & c'est communicatif...
Je finis cette missive avec le bord des mondes, exposition-installation qui tente une réponse en œuvres du peut-on faire art de tout? Et bien, oui, ou plutôt non, ou plutôt on s'en fout, l'important est ailleurs.Comme on dit, l'enjeu d'une œuvre ce n'est pas de pouvoir ou non en parler, mais qu'elle nous parle, elle... Dans ce cheminement, Theo Jansen m'a bien parlé, ses créatures de bambou et de plastoque qui s'animent comme par magie face au vent sont invraisemblables. D'autres inventions semi-artistiques méritent le détour mais la majorité font plus sourire que réfléchir. J'ose tout de même vous la suggérer car la balade dans l'imbruglio de salles, couloirs, passerelles et recoins de ce palais vaut le tour, le détour ...et puis s'en vont.

> l'homme cornu bientôt au festival hautes tensions
> le show must go on au théâtre des amandiers
>  le bord des mondes au palais de tokyo




15 décembre 2014

TOBERNAC




                                                                                                                                                                        7 doigts de la main - Credit DR

Tabernacle, les québécots envahissent la capitale! J'en veux pour preuve la foule de propositions de nos collègues artistes canadiens, il pleut littéralement du québecots en cette fin d'année parisienne. 
Les 7 doigts de la main -qui finalement sont plutôt les 9 doigts de la main- vous reçoivent tous les soirs dans leur cuisine pour une popote entre potes. Leurs facéties circassiennes et acrobaties en tout genre envoient du lourd. La compagnie présente Cuisine & confessions, spectacle tout public, bien ficelé quoique très attendu, mais moins bling-bling que leurs précédentes créations. Se consomme donc facilement, léger à digérer, sans que ce soit de la haute gastronomie artistique mais plutôt un bon plat familial, parfaitement cuit, grâce à une recette maîtrisée du bout des 9 doigts. (facile)
Dans un style bien particulier, le québécois Alain Choquette est tout aussi impressionnant. Son truc à lui, ce n'est pas l'acrobatie du corps mais l'illusion des tours. Ma-gi-cien, métier respectable (ça rentre dans "profession intermédiaire" ça?), ici, point de close-up un peu poussiéreux ou de paillettes aguicheuse, Alain fait dans la poésie de la magie (si, si ça existe)… Des manipulations drôles et mystérieuses, une participation du public mesurée et des confidences toute en finesse forment un spectacle réussi et rafraichissant. Certains tours sont justes invraisemblables et on se refait le "shau" (comme dirait Alain le canadien) en sortant pour tenter une explication tangible de ce qui s'est produit sous vos yeux.. et sous vos applaudissements (Jacques Martin, sort de ce corps). 
Les canadiens sont plus que bienvenus dans nos contrées gauloises, ça souffle du squamish dans les colonnes Morris et sous les imperméables des boulevards Haussmann, conclusion c'est super le fun ct'affaire!

> cuisine & confessions des 7 doigts de la main à la Cigale jusqu'au 3 janvier
> alain choquette dans Drôlement magique à la Gaité montparnasse jusqu'en mai 2015